L'était un petit coq, dans une basse-cour,
Qui claironnait gaiement, dès le lever du jour.
Dressé sur ses ergots, la crête vers le ciel,
Il lançait aux échos son vigoureux appel.
Tous ses cocoricos excédaient les
voisins,
Qui vouaient aux enfers le réveille-matin,
Pestant jour après jour contre le volatile,
Dont le talent vocal leur échauffait la bile.
Ils allèrent se plaindre à la
gendarmerie,
Firent des pétitions auprès de la mairie,
Demandant qu'on châtie le vil propriétaire,
Et que le malfaisant, vite l'on fasse taire.
Mais le rendre muet n'est pas
chose commode.
Il n'y a pour cela ni règle, ni méthode.
Alors, chaque matin, le bruyant coquelet,
Pas complexé du tout de zèle redoublait.
Lors un petit garçon enfin eut une
idée.
Il partit en forêt, tout seul, à la rosée,
Sous le ciel bleu lavé d'une journée d'automne
Avec une cassette et un magnétophone.
Puis il enregistra, dès le soleil
levé
Les plus beaux chants d'oiseaux que l'on puisse rêver.
Le lendemain matin, à la pointe du jour,
La cassette il joua près de la basse-cour.
Ce furent triolets, gazouillis, roucoulades,
Trilles, pizzicatti, vocalises, roulades.
Chantecler, alerté par ces nobles
échos,
Entonna sur le champ son piètre bel canto.
Mais il dut malgré lui bien vite constater
Qu'avec ces ténors là, il ne pouvait lutter,
Car plus il essayait d'égaler leurs prouesses,
Plus il réalisait sa propre maladresse.
Il lança un dernier petit couac
éraillé,
Puis courut se cacher au fond du poulailler,
La tête vers le sol, et portant bas la crête,
Devant l'hilarité de toutes les poulettes.
Et notre petit coq, dépité et
confus,
Jura que désormais, il ne chanterait plus !
Renée Jeanne Mignard Poétesse française
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Avec l'aimable autorisation de
l'auteure
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