L’ennui est sinon notre pire ennemi, du moins l’un des plus sournois. Il ternit et ronge.
Il n’est pas question ici de cet état d’âme passager qui nous affecte tous à un moment ou l’autre de notre vie, mais bien de cette maladie chronique de l’âme qui éteint une à une toutes les étoiles qui voudraient s’y allumer.
Celui qui se laisse miner par l’ennui n’éprouve nul intérêt ou enthousiasme pour quoi que ce soit.
S’il lui arrive d’avoir quelque élan, cela ne dure pas. Tout le lasse et le fatigue et il agit ordinairement par obligation ou automatisme.
Si vous lui demandez de ses nouvelles, il répondra invariablement "qu’il faut que ça aille bien ". Jamais un "Ça va bien" spontané ne jaillit.
Ses pensées et ses sentiments sont au neutre, ni joyeux ni noirs : son âme est peinte en gris.
Ce mal est plus insidieux que la tristesse parce que, contrairement à celle-ci, il n’a pas de cause ou d’objet déterminé.
Un but, un projet précis manquent à celui qui s’ennuie : il tâte de tout mais retombe aussitôt dans son inertie.
Il boude la vie.
Il semble y avoir deux catégories de gens qui souffrent d’ennui : ceux qui savent qu’ils sont ainsi et les autres qui n’ont jamais identifié leur mal.
Les premiers ne veulent pas sortir de leur paresse, ils semblent malgré tout chérir et entretenir cet état d’âme qui leur permet de vivre sans effort, sans désir, sans danger.
Ils ont tué la vie en eux, plus rien ne pousse dans cette terre ingrate.
Les autres cherchent à oublier en allant cueillir dans le plaisir et la fête perpétuelle un apaisement à leur malaise, auquel ils n’ont pas encore donné un nom.
"Le bonheur suppose sans doute toujours quelques inquiétudes, quelque passion, une pointe de douleur qui nous éveille à nous-mêmes."
Les êtres "bien nés" n’aiment pas le bonjour facile. Ils lui préfèrent un certain risque, du moins l’effort. Ils ont besoin du contact rude de la vie pour y mesurer leur force.
Les chemins tout unis nous apportent peut-être une certaine satisfaction mais elle sera de courte durée. Seuls les chemins difficiles peuvent nous procurer un réel bonheur.
Référence : Thérèse Hart
Tiré du livre : Pensée de mon jardin
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