LE HARCÈLEMENT DANS
L'ENTREPRISE
Dans l’entreprise, c’est de la rencontre de l’envie de pouvoir et de la
perversité que naissent la violence et le harcèlement.
Par harcèlement sur le lieu de travail, il faut entendre toute conduite abusive
se manifestant notamment par des comportements, des paroles, des actes, des
gestes, des écrits, pouvant porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à
l’intégrité physique ou psychique d’une personne, mettre en péril l’emploi de
celle-ci ou dégrader le climat de travail.
Le harcèlement a été identifié dans les pays anglo-saxons et les pays nordiques
où il a été qualifié de mobbing.
Cette guerre psychologique sur le lieu de travail regroupe deux phénomènes
:
- l’abus de pouvoir, qui est démasqué très vite et pas forcément accepté par les
salariés ; - la manipulation perverse, plus insidieuse à se mettre en place et qui fait
d’autant plus de ravages.
Le harcèlement naît de façon anodine et se propage insidieusement. Dans un
premier temps, les personnes concernées ne veulent pas se formaliser et prennent
à la légère piques et brimades. Puis, ces attaques se multiplient et la victime
est régulièrement acculée, mise en état d’infériorité, soumise à des manœuvres
hostiles et dégradantes pendant une longue période.
De toutes ces agressions, on ne meurt pas directement, mais on perd une partie
de soi-même. On revient chaque soir, usé, humilié, abîmé. Il est difficile de
s’en remettre.
Ce n’est pas la remarque blessante qui constitue le harcèlement, c’est la
répétition des vexations, des humiliations, sans aucun effort pour les nuancer
qui constitue le phénomène destructeur.
Quand le harcèlement apparaît, c’est comme une machine qui se met en marche et
qui peut tout broyer. Il s’agit d’un phénomène terrifiant parce qu’inhumain,
sans états d’âme et sans pitié. L’entourage professionnel, par lâcheté, par
égoïsme ou peur, préfère se tenir à l’écart. lorsque ce type d’interaction
asymétrique et destructrice se met en place, il ne fera que s’amplifier si une
personne extérieure n’intervient pas énergiquement. En effet, dans un moment de
crise, on a tendance à accentuer ce que l’on est une entreprise rigide devient
encore plus rigide, un employé dépressif encore plus dépressif, un agressif plus
agressif, etc. On accentue ce que l’on est.
Il s’agit d’un phénomène circulaire. Rien ne sert alors de chercher qui est à
l’origine du conflit. On en oublie même les raisons. Une suite de comportements
délibérés de la part de l’agresseur est destinée à déclencher l’anxiété de la
victime, ce qui provoque chez elle une attitude défensive, elle-même génératrice
de nouvelles agressions. Après un certain temps d’évolution du conflit se
mettent en place des phénomènes de phobie réciproque la vision de la personne
haïe provoque une rage froide chez l’un, la vision du persécuteur déclenche chez
la victime un phénomène de peur. C’est un réflexe conditionné agressif ou
défensif. La peur entraîne chez la victime des comportements pathologiques qui
serviront d’alibis pour justifier rétroactivement l’agression. Elle réagit le
plus souvent d’une manière véhémente et confuse. Quoi qu’elle puisse
entreprendre, quoi qu’elle fasse tout est retourné contre elle par ses
persécuteurs. Le but de la manœuvre est de la désarçonner, de la pousser à la
confusion totale et à la faute.
Même si le harcèlement est horizontal (un collègue harcèle une autre collègue),
la hiérarchie n’intervient pas. Elle refuse de voir ou laisse faire. Elle ne
prend parfois conscience du problème que lorsque la victime réagit de façon trop
voyante (crise de nerfs, pleurs) ou qu’elle est trop fréquemment en arrêt de
travail. Le conflit dégénère vraiment parce que l’entreprise refuse de s’en
mêler. Il faut savoir que si à un moment donné du processus, quelqu’un réagit
d’une façon saine, le processus s’arrête.
Qui est visé
Contrairement à ce que leurs agresseurs essaient de faire croire, les victimes
ne sont pas au départ des personnes atteintes d’une quelconque pathologie ou
particulièrement faibles. Au contraire, le harcèlement se met en place quand une
victime réagit à l’autoritarisme d’un chef et refuse de se laisser asservir.
C’est sa capacité de résister à l’autorité malgré les pressions qui la désigne
comme cible.
Le harcèlement est rendu possible parce qu’il est précédé d’une dévalorisation,
qui est acceptée puis cautionnée par le groupe, de la victime par le
persécuteur. Cette dépréciation constitue une justification a posteriori de la
cruauté exercée contre elle et conduit à penser qu’elle a bien mérité ce qui lui
arrive.
Lorsque le processus de harcèlement est en place, la victime est stigmatisée on
dit qu’elle est difficile à vivre, qu’elle a mauvais caractère, ou bien qu’elle
est folle. On met sur le compte de sa personnalité ce qui est la conséquence du
conflit, et on oublie ce qu’elle était auparavant ou ce qu’elle est dans un
autre contexte.
Qui agresse qui
Le comportement d’un groupe n’est pas la somme des comportements des individus
qui le composent; le groupe est une nouvelle entité qui a ses propres
comportements. Freud admet la dissolution des individus dans la foule et y voit
une double identification, horizontale par rapport à la horde (le groupe) et
verticale par rapport au chef.
Un collègue agresse un autre collègue
Les groupes tendent à niveler les individus et supportent mal la différence.
Dans certains corps de métier, il n’est pas facile pour un homme ou ne femme de
se faire respecter quand il ou elle arrive. Ce sont des plaisanteries
grossières, des gestes obscènes, un mépris de tout ce qu’il ou elle peut dire,
le refus de prendre son travail en considération. Cela paraît du bizutage, tout
le monde rit, y compris les hommes ou les femmes présentes. Ils ou elles n’ont
pas le choix.
Un supérieur agressé par des subordonnés
Le cas est rare. Il s’agit en général d’une personne venant de l’extérieur, dont
le style ou les méthodes sont réprouvés par le groupe et qui ne fait pas
l’effort de s’adapter ou de s’imposer. Ce peut être aussi un ancien collègue qui
a été promu sans que le service n’ait été consulté.
Un subordonné agressé par un supérieur
C’est le cas le plus fréquent.
COMMENT EMPÊCHER UNE
VICTIME DE RÉAGIR
Pour garder le pouvoir et contrôler l’autre, on utilise des manœuvres anodines
qui deviennent de plus en plus violentes si l’employé résiste. Dans un premier
temps, on lui retire tout sens critique jusqu’à ce qu’il ne sache plus qui a
tort qui a raison. On le stresse, on le houspille, on le surveille, on le
chronomètre pour qu’il se sente en permanence sur le qui-vive, et surtout on ne
lui dit rien de ce qui pourrait lui permettre de comprendre ce qui se passe. Le
salarié est acculé. Il accepte toujours plus et n’arrive pas à dire que c’est
insupportable. Quel que soit le point de départ et quels que soient les
agresseurs, les procédés sont les mêmes on ne nomme pas le problème, mais on
agit de façon sournoise pour éliminer la personne au lieu de trouver une
solution. Ce processus est amplifié par le groupe, qui est pris à témoin ou même
participe activement au phénomène.
Le harcèlement dans l’entreprise passe ensuite par plusieurs étapes qui ont
comme point commun un refus de communication.
Refuser la communication directe
Le conflit n’est pas nommé mais il est agit quotidiennement par des attitudes de
disqualification. L’agresseur refuse d’expliquer son attitude. Ce déni paralyse
la victime qui ne peut se défendre, ce qui rend possible la poursuite de
l’agression. En refusant de nommer le conflit, de discuter, l’agresseur empêche
une discussion qui permettrait de trouver une solution. Dans le registre de la
communication perverse, il faut empêcher l’autre de penser, de comprendre, de
réagir.
Se soustraire au dialogue est une façon habile d’aggraver le conflit, tout en le
portant au crédit de l’autre. C’est une façon de dire, sans le dire avec des
mots, que l’autre ne vous intéresse pas ou même qu’il n’existe pas. Comme rien
n’est dit, tout peut être reproché. Quand la victime a une propension à se
culpabiliser, c’est royal.
Disqualifier
L’agression ne se passe pas ouvertement, ce qui pourrait permettre de répliquer,
elle est pratiquée de façon sous-jacente, dans le registre de la communication
non verbale soupirs excédés, haussements d’épaules, regards méprisants, ou bien
non-dits, sous-entendus; allusions déstabilisantes ou malveillantes, remarques
désobligeantes... On peut ainsi amener progressivement le doute sur les
compétences professionnelles d’un salarié, en remettant en question tout ce
qu’il dit ou fait.
Dans la mesure où les agressions sont indirectes, il est difficile de se
défendre. Comment décrire un regard chargé de haine. Comment rapporter des
sous-entendus, des non-dit. La victime, elle-même doute de ses perceptions, elle
n’est pas sûre de ne pas exagérer son ressenti. On l’amène à douter d’elle-même.
La disqualification consiste aussi à ne pas regarder quelqu’un, ne pas dire
bonjour, parler de la personne comme d’un objet (on ne parle pas aux choses),
dire à quelqu’un devant la victime « Tu as vu, il faut être vraiment ringard pour
porter des vêtements pareils ». C’est nier la présence de la victime, ne plus lui
adresser la parole, ou profiter de ce qu’elle se soit absentée cinq minutes de
son bureau pour lui déposer un dossier avec un Post-it dessus, au lieu de lui
demander le travail directement.
Ce sont aussi des critiques indirectes dissimulées dans une plaisanterie, des
railleries, des sarcasmes. On peut ensuite dire « n’est qu’une plaisanterie,
personne n’est jamais mort d’une plaisanterie ». Le langage est perverti. Chaque
mot cache un malentendu qui se retourne contre la victime désignée.
Discréditer
Pour cela, il suffit d’insinuer le doute dans la tête des autres « ne crois pas
que... » On peut ensuite par un discours faux, fait d’un assemblage de
sous-entendus, de non-dits, mettre en place un malentendu pour l’exploiter à son
avantage.
Pour enfoncer l’autre, on le ridiculise, l’humilie, le couvre de sarcasmes
jusqu’à ce qu’il perde confiance en lui. On l’affuble d’un surnom ridicule, on
se moque d’une infirmité ou d’une défaillance. On utilise aussi la calomnie, les
mensonges, les sous-entendus malveillants. On s’arrange pour que la victime le
sache sans qu’elle puisse pour autant s’en défendre.
Isoler
Lorsque l’on a décidé de détruire psychologiquement un salarié, pour qu’il ne
puisse pas se défendre, il faut d’abord l'isoler en cassant les alliances
possibles. Quand on est seul, il est beaucoup plus difficiles de se rebeller,
surtout si on vous fait croire que tout le monde est contre vous.
Par des insinuations ou des préférences affichées, on provoque des jalousies, on
monte les gens les uns contre les autres, on sème la discorde. Le travail de
déstabilisation est ainsi fait par des collègues envieux, et le véritable
agresseur pourra dire qu’il n’y est pour rien.
Lorsque la mise à l’écart vient de collègues, c’est manger seul à la cantine, ne
pas être invité lorsqu’il y a un pot.
Lorsque l’agression vient de la hiérarchie, la victime désignée est
progressivement privée de toute information. Elle apprend son devenir par des
notes de service. Plus tard, c’est la mise en quarantaine, au placard.
Brimer
Cela consiste à confier à la victime des tâches inutiles ou dégradantes. C’est
fixer des objectifs impossibles à tenir, obligeant à rester tard le soir, à
revenir le week-end pour voir ce rapport urgent jeté à la poubelle.
Ce peuvent également être des agressions physiques mais pas directes des
négligences qui provoquent des accidents, des objets lourds qui tombent comme
par hasard sur les pieds de la victime.
Pousser l’autre à la faute
Un moyen très habile de disqualifier quelqu’un consiste à le pousser à la faute
pour pouvoir le critiquer ou le rabaisser, mais aussi pour qu’il ait une
mauvaise image de lui-même. Il est très facile, par une attitude de mépris ou de
provocation, d’amener quelqu’un d’impulsif à la colère ou à un comportement
agressif repéré de tous. On peut ensuite dire qu’elle est folle, qu’elle
perturbe la bonne marche du service.
Le harcèlement sexuel
Il ne s’agit alors pas d’obtenir des faveurs sexuelles mais de marquer son
pouvoir. La femme harcelée est à disposition du harceleur.
LE POINT DE DÉPART DU
HARCÈLEMENT
L’abus de pouvoir -
Les manœuvres perverses
Quand un individu pervers entre dans un groupe, il tend à rassembler autour de
lui les membres du groupe les plus dociles qu’il séduit. Si un individu ne se
laisse pas embrigader, il est rejeté par le groupe et désigné comme bouc
émissaire. Un lien social se crée ainsi entre les membres du groupe dans la
critique commune de la personne isolée, par des potins et des ragots. Le groupe
est alors sous influence et suit le pervers dans le cynisme et le manque de
respect. Chaque individu n’a pas pour autant perdu tout sens moral, mais,
dépendant d’un individu dépourvu de scrupules, ils perdent tout sens critique.
Le but d’un individu pervers est d’accéder au pouvoir ou de s’y maintenir par
n’importe quel moyen, ou bien encore de masquer sa propre incompétence. Pour
cela il lui faut se débarrasser de quiconque constituerait un obstacle à son
ascension ou serait trop lucide sur ses façons de faire. On ne se contente donc
pas d’attaquer quelqu’un de fragilisé comme dans l’abus de pouvoir mais on crée
la fragilité afin d’empêcher l’autre de se défendre.
La peur génère des conduites d’obéissance, voire de soumission, de la part de la
personne ciblée, mais aussi des collègues qui laissent faire, qui ne veulent pas
voir ce qui se passe autour d’eux. C’est le règne de l’individualisme, du chacun
« soi ». L’entourage craint, s’il se montre solidaire, d’être stigmatisé. Il ne
faut pas faire de vagues.
Lorsque la victime réagit et tente de se rebeller, la malveillance latente fait
place à une hostilité déclarée. Commence alors la phase de destruction morale
qui a été qualifiée de psychoterreur. Là, tous les moyens sont bons, y compris
la violence physique, pour démolir la personne désignée. Cela peut la conduire à
un anéantissement psychique ou au suicide. Dans cette violence, l’intérêt de
l’entreprise est oublié par l’agresseur, qui veut uniquement la peau de sa
victime.
Dans le fonctionnement pervers, il n’y a pas que la quête du pouvoir, il y a
surtout une grande jouissance à utiliser l’autre comme un objet, comme une
marionnette. L’agresseur réduit l’autre à une position d’impuissance pour
ensuite le détruire en toute impunité.
Porter plainte est l’unique façon de mettre fin à la psychoterreur. Mais il faut
du courage ou être vraiment à bout car cela implique une rupture définitive avec
l’entreprise. Il n’est pas sûr, en outre, que la plainte soit reçue, ni que la
procédure déclenchée aboutisse d’une façon positive.
L’entreprise qui laisse faire
Dans les groupes de travail sous pression les conflits naissent plus facilement.
Les nouvelles formes de travail, qui visent à accroître les performances des
entreprises en laissant de côté tous les éléments humains sont en génératrices
de stress et créent ainsi les conditions favorables à l’expression de la
perversité.
L’entreprise qui encourage les méthodes perverses
L’entreprise peut elle-même devenir un système pervers lorsque la fin justifie
le moyens et qu’elle est prête à tout, y compris à détruire les individus pour
parvenir à ses objectifs.
CONSEILS PRATIQUES DANS
L'ENTREPRISE
Repérer
Avant toute chose, il est important de bien repérer le processus de harcèlement
et si possible de l’analyser. Si on a le sentiment d’une atteinte à sa dignité
ou à son intégrité psychique en raison de l’attitude hostile d’une ou de
plusieurs personnes, ce régulièrement et sur une longue période, on peut penser
qu’il s’agit effectivement de harcèlement moral.
L’idéal est de réagir le plus tôt possible, avant d’être englué dans une
situation où il n’y a pas d’autre solution que le départ.
Dès lors, il est important de noter toute forme de provocation ou toute
agression. Comme pour le harcèlement psychologique familial, la difficulté de se
défendre réside dans le fait qu’il y a rarement des preuves flagrantes.
La victime devra donc accumuler les traces, les indices, noter les injures,
faire des photocopies de tout ce qui pourrait à un moment ou à un autre
constituer sa défense.
Il serait souhaitable qu’elle s’assure le concours de témoins. Malheureusement,
dans un tel contexte, les collègues se défilent.
Trouver de l’aide au sein de l’entreprise
Tant que l’on est en état de se battre il faut chercher de l’aide d’abord au
sein de l’entreprise. Trop souvent les salariés ne réagissent que lorsqu’il y a
une procédure de licenciement en cours. Cette recherche n’est pas évidente car
si la situation a pu se dégrader à ce point, c’est souvent que le responsable
hiérarchique, s’il n’est pas lui-même moteur du processus, n’a pas su réagir de
façon efficace. Si ce soutien moral ne peut être obtenu dans le service, il peut
être recherché dans d’autres services.
À chaque étape d’une recherche d’aide au sein de l’entreprise, le salarié peut
sortir du processus de harcèlement s’il a la possibilité de rencontrer un
interlocuteur qui sache l’écouter.
Quand l’entreprise est de taille suffisante, il faut d’abord aller voir le DRH,
cela n’est efficace que si le « » prime sur le « ».
Si le DRH ne fait rien, il faut aller voir le médecin du travail qui aidera
d’abord à verbaliser le problème. Par ses constats au poste de travail, et lors
de la visite médicale, il peut permettre aux salariés et aux responsables de
prendre conscience du problème et de leurs conséquences graves. Tout dépend de
la place du médecin du travail au sein de l’entreprise.
Résister psychologiquement
Pour se défendre, il faut être en bon état psychologique, ce qui n’est pas
simple puisque la première étape du harcèlement consiste à déstabiliser la
victime. Il faut donc consulter un psychiatre ou un psychothérapeute afin de
retrouver l’énergie pour se défendre. Ce qui implique lorsque l’on est soignant
d’aller voir dans un autre département.
Pour diminuer le stress et ses conséquences, la seule solution est l’arrêt de
travail. Beaucoup de victimes le refusent de peur d’aggraver le conflit.
Si la personne est dépressive, une aide médicamenteuse, anxiolytique et
antidépressive peut s’avérer indispensable.
La personne ne devra réintégrer son travail que lorsqu’elle pourra se défendre.
Cela peut conduire à un arrêt de travail relativement long (parfois plusieurs
mois) qui se transformera éventuellement en Congé maladie de longue durée.
Dans les relations avec le harceleur, il est plus facile de se soumettre plutôt
que de résister et risquer le conflit. Quoi qu’elles éprouvent, les victimes
doivent jouer l’indifférence, garder le sourire et répondre avec humour mais
sans en rajouter dans l’ironie. Elles doivent rester imperturbables et ne jamais
entrer dans le jeu de l’agressivité. Il leur faut laisser dire, ne pas s’énerver
tout en notant chaque agression pour préparer leur défense.
Pour limiter le risque de faute professionnelle, la victime doit être
irréprochable. Elle est sous les feux de l’actualité. Le moindre retard, la
moindre faute seront tenus pour des preuves de sa responsabilité dans le
processus.
Il serait bon qu’elle apprenne la méfiance en fermant ses tiroirs à clé, en
emportant avec elle son agenda professionnel ou un dossier important sur lequel
elle travaille, même, à l’heure du déjeuner.
Afin de retrouver une certaine autonomie de pensée et un esprit critique, les
victimes devront appliquer une nouvelle grille de communication, comme un filtre
systématique, qui leur permette de réajuster la réalité au bon sens. Prendre les
messages au pied de la lettre, au besoin, en faisant préciser, et refuser
d’entendre les sous-entendus.
Agir
Sur un plan professionnel, il faut être extrêmement vigilant afin de contrer la
communication perverse. Il faudra anticiper sur les agressions en assurant qu’il
n’y a aucune ambiguïté dans les consignes ou les ordres, en faisant lever les
imprécisions et éclaircir les points douteux. Si les doutes subsistent, le
salarié devra solliciter un entretien pour avoir des explications. En cas de
refus, il ne faut pas hésiter à exiger cet entretien par lettre recommandée. Ces
courriers pourront servir de preuves du manque de dialogue en cas de conflit. Il
faut mieux passer pour anormalement méfiant, quitte à passer pour paranoïaque,
que de se laisser mettre en faute. Il n’est pas mauvais, non plus, que la
victime inquiète son agresseur en lui faisant savoir que, désormais, elle ne se
laissera plus faire.
C’est habituellement lorsque la victime constate qu’aucune solution n’est
proposée, et qu’elle craint un licenciement ou qu’elle envisage de donner sa
démission qu’elle se tourne vers les syndicats ou les représentants du
personnel. Mais il faut savoir que quand une situation de harcèlement est
communiquée aux syndicats, cela devient un conflit ouvert. Leur intervention
consiste alors à négocier un départ. Il est très difficile d’obtenir une
médiation à ce niveau car les représentants du personnel ont en France beaucoup
plus un rôle revendicatif qu’un rôle d’écoute et de médiation.
Pour un entretien préalable au licenciement, la loi prévoit qu’on peut se faire
accompagner par la personne de son choix. Ce peut être un délégué syndical s’il
y en a dans l’entreprise, ou bien un conseiller des salariés. Les conseillers
des salariés sont des syndicalistes extérieurs à l’entreprise dont on trouve la
liste dans les mairies et dans les préfectures, et qui vont défendre
bénévolement les salariés dans les petites structures. Dans le harcèlement, il
est important que l’accompagnateur soit quelqu’un en qui on a toute confiance et
dont on pense a priori qu’il ne se laissera pas manipuler.
Faire intervenir la justice
COMMENT GUÉRIR
Choisir son psychothérapeute
Nommer la perversion S’en sortir
L’essentiel n’est pas de savoir comment on s’est mis dans cette
situation mais d’en sortir. Donc soutien, réconfort pour permettre à la
victime de sortir de la peur et de la culpabilité.
Quand la perversion a été nommée, la victime doit repenser les événements du
passé en fonction de ce qu’elle aura appris de son agression. Elle doit, avec
courage, se demander quel sens avaient tel mot ou telle situation.
Se dégager de la culpabilité
Sortir de la souffrance Guérir
|