24 contes - 1 conte pour chaque soir de l'Avent

 

 

 

 

 

Manolo l’escargot tirait un trait bien droit dans la neige. Ce trait ne durait pas. Les flocons qui tombaient avec grâce pesaient sur sa coquille et comblaient rapidement sa trace. Il glissait dans la forêt silencieuse.

Soudain, le sol se mit à trembler. Bientôt, le souffle chaud d’Alain le poulain fit fondre les flocons sur son dos.

- Où tu vas comme ça ? lui demanda Alain dont les flancs dégageaient un nuage de vapeur.

- Bof ! Pas bien loin, répondit Manolo.

- Bon, on se voit plus tard, j’ai besoin de me dégourdir les pattes.

Et tous deux repartirent, chacun à son allure.

Un mètre plus loin, Manolo leva ses cornes vers le ciel d’où tombait la voix de Christelle l’hirondelle.

- Alors Manolo, on se promène ? lui dit-elle.

- Oui, répondit Manolo, mais je ne m’éloigne pas vraiment.

Elle se mit à rire et le salua d’un battement d’ailes.

Ce fut bientôt Simonin le lapin qui se porta à sa hauteur.

- Alors Manolo, tu te prépares pour Noël ?

- Bah ! Je serai bien content si je suis revenu chez moi pour le réveillon !

- Sacré farceur ! lui lança Simonin en s’éloignant par petits bonds rapides.

Après son départ, Manolo resta un moment sans bouger. Ses amis en avaient de la chance, eux qui venaient et disparaissaient en un éclair ! Que connaîtrait-il du vaste monde, lui, Manolo, qui se déplaçait à une vitesse d’escargot ?

Depuis qu’il avait quitté sa maison, au matin, il n’avait réussi qu’à traverser un pré enneigé. Il savait que le monde est plus vaste qu’un pré, bien plus vaste, et qu’il se refuse aux escargots incapables de le traverser.

Il fallait oublier, repartir, sa maison n’était qu’à une vingtaine de mètres et on l’attendait, mais il se sentait si fatigué… si fatigué…

Il avait dû s’endormir car une étroite planche de bois lui barrait le passage, le séparant de sa maison. Au-dessus, ce qui ressemblait à un chariot lui bouchait en partie le ciel criblé d’étoiles. Manolo se mit à escalader, mais ne put aller bien loin.

- Vous êtes prêts à repartir les enfants ? fit une grosse voix dans la nuit.

Pour toute réponse, on entendit un martèlement de sabots sur la neige. Le chariot tangua, puis le morceau de bois sur lequel Manolo était juché se mit à glisser, comme un ski, à glisser de plus en plus vite, et à s’envoler !

Le vent fit frissonner ses cornes. Manolo, comme Christelle l’hirondelle, planait maintenant au-dessus de son pré qui ne fut bientôt pas plus grand qu’un confetti. Il comprit qu’il se trouvait sur le traîneau du Père Noël !

Toute la nuit, Manolo fit un grand voyage. Il fondit sur des savanes lointaines, des prairies sèches, des forêts touffues, des étendues de glace. À chaque fois, le traîneau se posait et repartait.

En une seule nuit, Manolo l’escargot vit le vaste monde comme ni Christelle, ni Simonin, ni Alain ne le verraient jamais. Il aurait voulu que cette nuit ne finisse jamais, mais elle devait finir… Ce fut son pré qu’il reconnut enfin, aussi petit qu’un confetti, puis de plus en plus grand.

Lorsque le traîneau s’immobilisa devant chez lui, Manolo était rempli d’images du monde entier. Il hésita avant de descendre car il serait bien reparti. Mais un visage barbu apparut devant lui.

- Le voyage t’a plu, Manolo ? lui demanda le Père Noël.

- Vous saviez que j’étais là ? répondit-il, surpris.

- Oui, le traîneau était beaucoup plus lourd que d’habitude… Tu dois retrouver ta famille, maintenant, et leur raconter ton beau voyage !

- Ils ne me croiront jamais, dit Manolo en descendant du traîneau.

- Tu n’auras qu’à leur montrer ton dos ! Joyeux Noël Manolo !

Et tandis que le traîneau s’éloignait, Manolo tourna la tête. Collée sur sa coquille comme sur une valise, une collection d’étiquettes s’étalait. Il lut Australie, Brésil, Amérique, Groenland, Kenya…

Il portait maintenant le vaste monde sur son dos.

FIN

Une histoire écrite par Stéphane Daniel et illustrée par Johanna Crainmark

Source : Enfant.com
 

 

 

 

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