«
La princesse posa ses lèvres sur son joli crapaud, et plouf !, il
disparut. À la place se tenait maintenant un beau prince qui la prit
dans ses bras et l’emporta en lui jurant de l’aimer jusqu’à la fin
des temps. »
La maman reposa le livre et frotta son crâne sur celui de son fils
qui l’avait écouté sans l’interrompre.
- Elle t’a plu cette histoire, Lancelot ?
- Je
l’adore ! lui répondit son petit crapaud.
-
Maintenant, il faut dormir, sinon, cette nuit, le
Père Noël passera au-dessus de toi sans s’arrêter.
- Je
dors déjà, maman…
Lancelot posa sa joue sur le nénuphar moelleux qui flottait sur la
mare qu’ils habitaient et ferma les yeux. Mais il ne s’endormit pas
tout de suite. Derrière ses paupières, comme chaque soir, Vanille la
jolie grenouille s’invita.
Elle venait de s’installer pas très loin de chez eux. Sa robe verte
était éblouissante et quand elle le regardait avec ses yeux
transparents, il avait l’impression de devenir complètement idiot.
D’après son papa, c’était bien la preuve qu’il était amoureux. Il ne
lui restait plus qu’à prendre Vanille dans ses bras et l’emporter,
comme dans le livre.
Lancelot souleva une paupière en espérant que le Père Noël ne
l’observait pas. Des libellules rasaient la surface de l’eau
stagnante. Plus loin voguait le grand nénuphar que ses parents
avaient décoré pour le réveillon.
Vanille et lui avaient lié connaissance. Son papa lui avait donné
pour conseil d’avouer qu’elle lui plaisait, mais Lancelot n’avait
rien dit, parce que le dire, c’est plus facile à dire qu’à faire.
Pourtant, quand elle le croisait et qu’ils bavardaient un moment,
Vanille avait la robe verte qui rougissait un peu. Était-ce le signe
qu’il lui plaisait aussi ?
Il décida de faire semblant de dormir. Il fit si bien semblant qu’il
s’endormit. À son réveil, ses parents souriaient sur leur nénuphar.
Un paquet était arrivé pendant la nuit de Noël. Lancelot, encore
ensommeillé, se précipita pour l’ouvrir.
Il n’avait rien demandé de particulier, il aimait les surprises. Il
fit des bonds sur place en découvrant que le Père Noël avait deviné
ce qui lui ferait plaisir. Il tenait entre ses pattes le cadeau
idéal.
Il le transporta de l’autre côté de la mare et le dissimula derrière
un bouquet d’herbes avant de guetter au bord de l’eau la venue de sa
grenouille préférée.
Vanille ne tarda pas à apparaître. Il bondit près d’elle.
- Tu
as reçu la visite du Père Noël ? lui demanda-t-il.
- Oui,
répondit Vanille, et j’ai été gâtée.
- Moi
aussi.
- Tu
as eu quoi ?
- Pour
le savoir, tu vas devoir me faire un bisou.
- Toi
aussi. Et un bisou comment ? Un bisou magique ?
- Je
suis sûr que tous tes bisous sont magiques…
Vanille baissa la tête, flattée, et se contenta, en guise de
réponse, de s’approcher de Lancelot. Quand elle fut près de lui,
elle déposa une bise sur le haut de sa tête.
-
Voilà, c’est fait ! dit-elle.
- Ne
bouge pas ! dit alors le petit crapaud.
Il lui tourna le dos et fila derrière les herbes. Les vêtements
reçus du Père Noël étaient étalés par terre. Il les enfila en
vitesse, le collant, les bottes à revers, la chemise blanche, la
veste dorée, sans oublier la ceinture où il glissa son épée de
prince charmant. Quand il se sentit prêt, il sauta hors de son abri
en criant :
-
Surprise !
Son sourire se figea à l’atterrissage ; il n’y avait plus personne.
« Elle est partie » se dit-il dans son costume de triste prince. Un
poids sur les épaules, il baissa la tête. Soudain, un cri le fit se
relever :
-
Surprise !
Sur sa gauche, les fleurs bleues d’un bouquet de myosotis venaient
de libérer Vanille qui, bien cachée, l’observait. Vêtue d’une robe
rose, une couronne sur la tête, elle improvisa une révérence.
Alors Lancelot le crapaud charmant la prit dans ses bras et
l’emporta en lui jurant de l’aimer jusqu’à la fin des temps.
FIN
Une histoire
écrite par Stéphane Daniel et illustrée par Johanna Crainmark
Source :
Enfant.com
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